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Monsieur Sarma

uitspraak

Sarma

uitleg

Je connais le vieux marché depuis très très longtemps. A l'époque il n’y avait quasiment pas d’arabes. Quasi pas. Maintenant je fais une parenthèse, quand quelqu’un me dit: “Arghh, il n’y a plus que des Arabes sur ce marché”, je dis: “Mais vous savez, le marché, c’est dur, les Belges y veulent plus travailler; heureusement qu’il y a encore les Arabes, sinon il n’y aurait plus personne sur ce marché. Tu vois? 'Paf’ hé, 'Raak’ comme on dit.

Il y avait un monsieur, il s'était installé marchand. Le premier je crois. Quand le marché était fini, cet homme faisait le tour de toutes les échoppes, une fois qu’il avait emballé, et il ramassait tout ce que les autres marchands avaient abandonnés. Tu vois ?
Et je travaillais toujours à la même place près d’une vieille Bruxelloise qui achetait des fonds de ?? etc…
Ça marchait du tonnerre son truc, et elle avait deux aidants; ils sont morts tous les deux maintenant, dont une femme, tous les trois étaient très sympathiques mais au début, je n’avais rien d’un marchand, j’avais rien du quartier, et il m’a fallu longtemps pour que ces gens m’acceptent. Un peu comme les paysans font: “Qu’est-ce que c’est ce type qui vient habiter mon village, près de chez moi?” – tu vois, hein ? Mais une fois qu’ils ont vu que je travaillais comme eux, que je n'étais ni plus ni moins, et que je ne pétais pas plus haut que j’avais le derrière, j’ai été adopté.
Et au contraire, parfois ils m’aidaient. Et alors, je reviens à mon monsieur arabe, mais il ramassait des trucs
c’est le cas de le dire, que t’aurais pas ramasser sur un bac!
Mais il venait d’un village là-bas, mais il y a des années, sûrement très pauvre, où un clou rouillé c'était un clou rouillé. C'était quelque chose. Et lui il arrive dans un pays là, disons riche, même si nous n'étions pas riches sur le marché hein mais, c'était le paradis économique par rapport à son chez lui.

Et alors je devais parler de cette dame .. Simone et cette madame Simone avait appelé ce type “Sarma”. Tu sais qu’est-ce que c’est Sarma ?
Sarma c’est à l'époque une grande surface, d’immédiatement après guerre, ça c'était installé, Place de Brouckère tu avais, les Galeries Anspach, tu avais … des magasins chics. L’autre, c'était le truc des pauvres. Sarma était vraiment …. Ça n’existe plus cette différence entre grands magasins. Maintenant, Colruyt c’est moins chic que Delhaize, tu vois il y a quand même encore une différence.
Mais à l'époque c'était évident.

S.A.R.M.A d’ailleurs, ça veut dire Société Anonyme de Récupération de Marchandises Avariées.
Peut-être à la base c’est vrai mais dans leurs grands magasins ils ne vendaient pas d’avariés. Ils avaient disons prospérer dans leur entreprise de base, et ils ont sauté dans la charrette des grands magasins.

Et alors, cette femme dont on parlait tout à l’heure l’appelait: “Tiens regarde, pour la Sarma”. C’est comme dans un village: les gens ont des surnoms. Evidemment je te parle de l’ancien vieux marché. Tu avais des Louis .. Il y avait un Louis Congo. Pourquoi Louis Congo ? Parce que sa spécialité était de racheter des vêtements, les plus bizarres possibles, il en faisait des colis et il envoyait ça au Congo Belge où il avait un répondant sur place qui vendait ça. Il faisait des affaires en or massif. Il transformait les loques, les vêtements usagés … un peu méchamment dans Tintin au Congo .. tu vois un roi nègre avec un haut chapeau huit reflets tu vois ? un pique, une queue de pie…
C'était le métier de ce monsieur. Au lieu de l’appeler monsieur Verstraeten ou Verschueren, c'était Louis Congo.
Un marchand qui en même temps était pompier volontaire, c'était Louis Pompier. Tu vois?!

Une histoire politique: il y avait les spéciaux, ceux qui sont en civil, la sûreté d'état, qui voulait me poser quelques questions. Un jour j’arrive au marché, et les gens disaient: “Louis, ils te cherchent”. Un deuxième, ou une femme: “Louis, ils te cherchent”. J’arrive dans mon stamcafé; dans mon bistro. Le patron: “Louis, ils sont venus, ils te cherchent”.
Moi je suis là, je ne vais pas me planquer!
“Oui, mais quand même!”
Je leur ai dit: “Vous savez monsieur, nous, on ne connait pas les gens comme ça. Je connais Louis Pompier, je connais Louis Congo et je connais Louis des Livres”. Ça, c'était moi tu vois ? Et la aussi le vieux marché, il y a une cohésion anti-police extraordinaire, extraordinaire. C'était comme un village. Le marché a beaucoup changé.
J'étais bouquiniste, je vendais des livres. Parce que tu ne connaissais pas le nom qu’on te donnait. Mon patron de bistro il voulait me couvrir, et il a inventé ça. Il connaissait très bien mon nom. Mais pour ne pas être une donneuse. c’est curieux comme histoire, hein?!
– A côté de 'monsieur Sarma’ il y avait quand même d’autres noms ..
– Oui tous avait leur nom ou quasi tous. Ça ne m’intéressait pas, je n’ai pas fait une enquête, mais… Caliche par exemple, un autre: Gamin, c'était un nom dit. Comme une armoire de manteau, pourquoi l’appeler gamin? Parce qu'à l'époque, il venait peut-être avec son père, et alors c'était le gamin. Ils avaient … comme dans un village… et tu n'étais pas censé savoir…
A Louis Congo on disait pas: “Bonjour monsieur Congo” on disait bonjour Louis. Et à Louis pompier aussi, c'était: “ Bonjour Louis”.
Mais quand on parlait d’eux, c'était un surnom.

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